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Des mots qui tuent

La question

Dans l’entreprise où je travaille, il est n’est pas rare de se faire insulter par nos supérieurs. J’ai de la peine à supporter cette attitude. Qu’en pensez-vous?

 

La réponse du psy

Parmi les synonymes du mot “insulte” on trouve deux catégories de mots, les actes (blessure, attaque) et les propos (grossièreté, injure) qui cohabitent le plus naturellement du monde. Le langage n’est pas neutre et même si les paroles s’envolent, elles n’en demeurent pas moins porteuses d’un sens qui peut être tranchant comme une lame de rasoir ou meurtrières comme une arme à feu. Les psychologues parlent volontiers des mots et des phrases en termes “d’actes performatifs”, au même titre qu’un geste ou un comportement brutal et odieux. Ainsi, la frontière entre l’agression physique et psychique est beaucoup plus ténue que l’on pourrait supposer: les blessures morales qu’inflige une langue de vipère valent bien les meurtrissures qu’occasionnent les instruments d’un tortionnaire même si leurs traces restent aussi discrètes que l’air qui transporte ces messages de fiel. L’Histoire nous enseigne d’ailleurs constamment à quel point l’oppression va de pair avec les brimades corporelles et l’harcèlement spirituel: les tyrans de tout acabit ont d’ailleurs bien compris qu’il ne suffit pas d’éliminer les contestataires en les privant de liberté. Encore faut-il leur museler la pensée en plongeant celle-ci dans le désarroi d’un dénigrement systématique fait de calomnie, de médisance, de persiflage et autres méchancetés verbales. Inciter les gens à se “défouler” par la parole plutôt que par l’acte, c’est ignorer totalement que les lois de la violence ne s’arrêtent pas au seuil des idées et que les pires avanies sont celles qui attaquent directement le coeur et l’esprit, avec des mots forgés dans la cruauté et trempés dans la haine...