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Le pire est à venir

La question

Incontestablement, ces derniers douze mois avaient formé une mauvaise année et si ça continuait à ce rythme, vous feriez bientôt appel à une équipe de spéléologues pour vous sortir de la masse de dossiers, factures, augmentations, tracas journaliers, hebdomadaires et mensuels qui vous ensevelissaient, tels des sables mouvants en quête d’une proie à digérer... Et la suite ne se présentait guère mieux, donnant tout son sel et son sens à la fameuse devise de votre voisin hypocondriaque “Le pire est à venir...”.

Le proverbe du sage Nô-Mi

Que le meilleur d'aujourd'hui soit le pire de demain!

 

La réponse du psy

Alors, même que vous juriez ne jamais vous laisser prendre au sortilège, vous aviez pris un rendez-vous discret chez un voyant, le Professeur Mamadoute, dont les nombreux talents, hérités de père en fils (“Tel père, tel pire!”), s’affichaient en dithyrambes dans une petite annonce. Qui sait, peut-être votre belle-mère vous avait-elle lancé quelque peau de banane dans votre subconscient karmique ou un ennemi invisible, tapi dans l’ombre de votre grisaille routinière, manipulait une poupée de cire à votre effigie, plantant savamment des aiguilles dans votre champ décisionnel subliminal...“Paiement après résultat”: c’était tentant. Bien sûr, le Professeur Mamadoute mit immédiatement les choses au point: ses nombreux clients le gratifiaient effectivement de récompenses sonnantes et trébuchantes une fois le pouvoir, la gloire et le charme auprès des femmes retrouvés, mais il y avait tout de même l’électricité à payer et les allumettes pour enflammer l’encens qui rendait l’atmosphère aussi lourde qu’un congrès de fumeurs de cigares cubains. Donc, avant même d’avoir reçu quelque bienfait céleste, vous aviez fait une bonne action: un Borromini changeait de propriétaire. Ensuite la séance fut très instructive: c’était confirmé, il y avait effectivement du bon et du mauvais dans votre vie, et si le destin n’était pas toujours favorable il n’en demeurait pas moins clément. Pas d’envoûtements mais un risque en cours de route: accident, pépin de santé, conflit au boulot, venin verbal au domicile conjugal, bref, un truc à garder à l’oeil. Mais les esprits étaient d’accord de se montrer bienveillants, à condition de prononcer quelques mots rituels, contenus dans une petite brochure, ancienne et unique, valant un autre Borromini. Ce n’était que le deuxième, mais le succès n’a pas de prix. Le précieux document en poche, proche de l’intoxication aux fumées d’encens, vous avez alors retrouvé la rue moite et froide avec une promesse: si l'année était à la hauteur de vos expectatives (pour l’instant ce n’étaient encore que des expectorations), vous apporteriez un dernier Borromini. Décidément, il devait être un fan d’architecture ancienne, ce Mamadoute! Et au moment de vous endormir, vous avez sagement suivi les conseils de l’éminent Professeur: un proverbe à réciter, chaque soir avant le coucher. Tiens donc? Votre voisin devait avoir négocié le même “pacte” car la première maxime ressemblait étrangement à la sienne: “Le pire est à venir pour qui est trop crédule...”