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Un verre dans la pomme

La question

L’image d’Épinal de l’alcoolique nous renvoie la caricature du pilier de bar, du poivrot de quartier, de l’éponge à spiritueux frisant le pour-mille de sang dans une mare éthylique.

 

La réponse du psy

C’est oublier qu’entre cette extrême et l’abstinence, il y a de quoi ranger quelques bouteilles et pas forcément du tord-boyaux! P. Fouquet, en 1955, a défini le critère essentiel qui distingue les véritables alcooliques des buveurs excessifs: “Il y a alcoolisme lorsqu’un individu a, en fait, perdu la liberté de s’abstenir d’alcool.”. Et c’est une petite minorité: ils ne représenteraient que 6-10% de l’ensemble des consommateurs, les autres restant dans la frange de l’abus répété. Ce qui guette l’homme d’affaires, le voyageur de commerce ou le barman appelés à multiplier les “verres de l’amitié” c’est ce que l’on appelle un “alcoolisme secondaire”: à force de jouer les gosiers en pente ils deviennent, sans s’en rendre compte, dépendants, sans pour autant aller tutoyer l’esprit-de-vin ou sombrer dans les abîmes de l’ivrognerie. La tolérance individuelle à l’alcool est un critère essentiel dans l’appréciation de ce risque, mais elle dépend d’un tel nombre de facteurs (âge, hygiène alimentaire, état physique et psychique...) qu’il est difficile de faire des pronostics même si le danger n’est jamais négligeable. Par ailleurs, il n’existe pas une “typologie” fixe de la personne dépendante de l’alcool, mais toutes les études montrent que dans tous les cas c’est une influence du milieu, du groupe d’appartenance qui ouvre la porte aux démons de l’ébriété. L’insécurité personnelle, la timidité, la nécessité de se surpasser, de se cacher derrière un masque de fonction contribuent naturellement fortement à ce besoin d’amener un peu de griserie dans son sang pour mieux briller et apaiser l’angoisse de n’être pas au top. Du reste, celui ou celle qui ne participe pas à une verrée en trinquant comme les autres passe facilement comme marginal(e) aussi insipide qu’une eau plate. A moins d’avoir des talents de magicien pour transformer le vin en boisson gazeuse, difficile donc d’échapper au risque d’avoir, à la longue, un verre dans sa pomme...